Lors d’un débat annuel du Conseil des droits de l’homme consacré aux droits de l’enfant et à leur « environnement sain », la Haut-Commissaire aux droits de l’homme, Michelle Bachelet, a rappelé l’importance d’un environnement sain et durable pour le développement des enfants.
« La survie, la santé, le bien-être et le développement des enfants dépendent d’un environnement sûr », a rappelé à Genève Mme Bachelet, estimant que « 93% des enfants vivent actuellement dans des environnements où la pollution de l’air dépasse les directives de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
« Malheureusement, de nombreux enfants vivent dans des zones polluées et sont exposés à des substances toxiques », a regretté Mme Bachelet, soulignant des données de l’OMS qui montrent que chaque année, « 1,7 million d’enfants de moins de cinq ans meurent à cause de facteurs environnementaux ».
Dans les pays en développement, quelque 12 millions d’enfants ont subi des lésions cérébrales permanentes dues à l’empoisonnement au plomb. Et 73 millions d’enfants dans le monde travaillent dans des conditions dangereuses où ils sont régulièrement exposés à des substances toxiques qui provoquent des lésions et des maladies cérébrales.
« Les enfants autochtones et ceux issus de communautés à faible revenu étaient parmi les plus touchés, une situation aggravée par la Covid-19 », a fait valoir la Cheffe des droits de l’homme de l’ONU.
La surexploitation de notre environnement augmente le risque de voir des maladies infectieuses comme la Covid-19
Pour Mme Bachelet, « la surexploitation de notre environnement augmente le risque de voir des maladies infectieuses comme le Covid-19 passer de l’animal à l’homme ».
« La pandémie est un exemple très puissant de la menace pour le bien-être humain qui résulte des dommages causés à l’environnement », a-t-elle ajouté. Elle s’entrecroise avec d’autres formes de dégradation de l’environnement, comme la pollution atmosphérique, qui exacerbe la vulnérabilité des personnes à de graves problèmes de santé lorsqu’elles sont exposées à la Covid-19.
Bien que de nombreux enfants échappent aux pires conséquences sanitaires de ce virus, ils sont lourdement pénalisés par les multiples impacts socio-économiques et les risques pour la protection de l’enfance que génère la pandémie, a relevé Mme Bachelet.
Dans ces conditions, la réponse à la Covid-19 doit se concentrer sur des mesures efficaces, basées sur les droits de l’enfant, qui protègent et bénéficient aux personnes les plus vulnérables, tout en faisant progresser les efforts pour réaliser les droits de l’homme et l’Agenda 2030.
Pour y arriver, les réponses à la Covid-19 doivent être coordonnées au niveau international. Et la coopération doit être fondée sur des données probantes et axées sur l’enfant – et elles doivent intégrer des mesures énergiques pour prévenir la perte de biodiversité, l’exposition des enfants à la pollution et aux déchets toxiques, et les dommages environnementaux.
Et pour la Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, un climat stable est donc la clé d’un environnement sûr, et les entreprises ont également la responsabilité de protéger les droits de l’enfant. Et dans ce combat pour la protection de l’environnement, Mme Bachelet s’est d’ailleurs réjouie que de nombreux enfants et jeunes se soient joints à cette lutte. « Nous devons tenir compte de leurs opinions afin qu’aucun enfant ne soit laissé pour compte », a insisté la Cheffe des droits de l’homme.
Côte d’Ivoire : 84% des enfants consultés reprochent aux entreprises de polluer l’environnement
En écho, le jeune adolescent ivoirien, Junior, s’est mué en porte-parole de sa tranche d’âge. Pour cet enfant de 14 ans et membre du Groupement des enfants de San Pedro (Côte d’Ivoire), l’enjeu est la sensibilisation. C’est la raison pour laquelle, leur groupement a mené des campagnes de sensibilisation sur les droits des enfants et les principes régissant les entreprises en matière de droits de l’enfant dans la ville de San Pedro et dans trois villages du département. L’objectif est « de faire le lien entre les activités des entreprises et leurs droits et donc de dénoncer les violations de leurs droits par les entreprises ».
« Ainsi, 84% des enfants que nous avons consultés ont affirmé que les entreprises polluent l’environnement du fait de leurs activités », a détaillé Junior, dans un message vidéo. Il reproche à ces entreprises de rejeter quotidiennement de « la fumée et des eaux usées dans l’environnement immédiat des populations ».
« Les entrepôts de stockage du cacao et les entreprises sont à proximité des habitations. Ainsi les produits de traitement du cacao vont vers les populations avec l’action du vent », a-t-il ajouté.
« Ces rejets causent de nombreuses maladies », a insisté Junior. Selon les autorités sanitaires de la ville, 35,84% des 2.000 personnes par an qui souffrent de maladies respiratoires et 38,19% des 3.000 personnes par an qui souffrent de maladies de peau dues à ces rejets sont des enfants. Et pour s’installer, les entreprises remblaient le lac et les voies d’évacuation des eaux de ruissellement causant des inondations en saison de pluies, a-t-il précisé.
Les résultats des différentes activités ont permis d’adresser plusieurs recommandations aux autorités, notamment créer un mécanisme pour recueillir les plaintes des enfants en lien avec la pollution de l’environnement. Il s’agit aussi d’impliquer les chefs, les communautés, les jeunes leaders, les femmes, les enfants, en plus des ONG de protection de l’environnement, dans l’attribution des autorisations d’installation des entreprises hors de la zone industrielle.
« Si rien n’est fait pour protéger l’environnement, nos droits seront brûlés par le soleil et noyés par la pluie » – Junior
Mais pour l’OMS, l’une des raisons pour lesquelles les enfants sont particulièrement vulnérables aux effets de la pollution de l’air tient au fait qu’ils respirent plus rapidement que les adultes et absorbent ainsi davantage de polluants. Ce qui fait qu’un quart des décès des enfants de moins de 5 ans est attribuable à des environnements pollués.
« Avoir accès à l’eau potable et au savon, pour lutter contre les maladies infectieuses, telle que la Covid-19 n’est aujourd’hui pas garantie pour les enfants », a déclaré la Dr Maria Neira, Directrice du Département Santé publique, déterminants sociaux et environnementaux de la santé à l’OMS.
Chaque année, des risques environnementaux, tels que la pollution de l’air intérieur et extérieur, la fumée secondaire, l’eau insalubre, le manque d’assainissement et une hygiène inadéquate, les expositions toxiques, tuent 1,7 million d’enfants de moins de 5 ans.
L’OMS est très préoccupée par les nouvelles données qui montrent comment la pollution atmosphérique touche les enfants. Près de 600.000 enfants sont décédés d’infections aiguës des voies respiratoires inférieures dues à la pollution de l’air.
Il faut donc développer une meilleure interaction avec nos écosystèmes. La santé humaine et animale sont étroitement liées, a-t-elle insisté.
« Il faut construire des villes avec un système de gestion des déchets durables et mettre en place un environnement moins pollué, plus sûr et propre tout en promouvant les droits de l’homme », a plaidé la Dr Neira devant le Conseil des droits de l’homme.
Mais pour le jeune ivoirien, les décideurs doivent prendre à cœur cette question environnementale. « Si rien n’est fait pour protéger l’environnement alors tous vos efforts pour la réalisation de nos droits seront brulés par le soleil et noyés par la pluie », a averti Junior.
SOURCE Centre d’actualités de l’ONU